Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Union européenne - Page 27

  • Retour sur la Conférence de Copenhague (suite)

    Un accord a minima à Copenhague

    Hélas ! Au fil des négociations, la perspective d’un accord contraignant et ambitieux s’est éloignée. Les medias, comme les témoins et les observateurs ont souligné la responsabilité des Etats-Unis opposés à une réduction significative des émissions (il acceptaient de la porter en 2020 à …- 4%  par rapport à 1990), celle de la Chine qui s’opposait à toute forme de contrôle international du respect des engagements pris, la désunion des pays en développement, et le désengagement de l’Union européenne qui, après avoir pris des positions volontaristes ne les a pas assumées jusqu’au bout lorsqu’elle a constaté qu’elle n’était pas suivie. Le résultat est connu : un accord final qualifié dans le meilleur des cas de « faible », et le plus souvent de « lamentable » signifiant l’échec du Sommet.

    Qu’en est-il exactement ?

    « L'accord de Copenhague »  n’est pas un document contraignant. En guise d’objectifs chiffrés, il « reconnaît » la nécessité de limiter la hausse de température à 2 degrés. Plus intéressant car révélant la prise de conscience d’une nécessaire solidarité internationale, l’accord prévoit un financement de 10 milliards de dollars par an entre 2010 et 2012 et se fixe comme objectif 100 milliards par an jusque vers 2020. La répartition de l’effort et les engagements financiers pris par l’UE et les Etats-Unis ne sont cependant pas repris dans le texte. Autres points qui paraissent  prometteurs mais ne sont guère concrétisés : une méthode de contrôle des réductions d'émissions de CO2 des pays industrialisés et émergents, sans toutefois d’élément de contrainte (donc dépendant du bon vouloir des états), et un mécanisme pour lutter contre la déforestation mais sans qu’un cadre d’action soit défini.

    L’accord est présenté comme une étape vers un processus de lutte contre le changement climatique plus ambitieux à partir de 2010. Ainsi, par exemple, il comprend deux annexes permettant de recevoir des engagements chiffrés des pays, qui devraient être complétées avant fin janvier.

    Et maintenant, que peut faire l’Union européenne ?

    Pour l’Union européenne, le résultat de la Conférence de Copenhague est très inférieur aux ambitions. Accusés d’avoir renoncé à maintenir les engagements rappelés par le dernier Conseil de Bruxelles, les négociateurs européens ont rappelé à juste titre que ceux-ci étaient conditionnés au fait que d’autres pays industrialisés s’engagent également. Comme le soulignait l’un des participants à la table ronde du Sénat sur la préparation de la Conférence de Copenhague « l'Europe ne pourra pas régler seule la question des changements climatiques, puisqu'elle ne représente aujourd'hui que 17 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone. Chacun doit apporter sa contribution selon "ses capacités et son niveau de responsabilité ». Il est assez paradoxal de voir l’UE figurer au banc des accusés alors qu’elle est, par rapport aux autres pays, en pointe dans la prise de conscience du changement climatique et dans le respect des objectifs du protocole de Kyoto. Lui demander plus c’est faire abstraction des dangers pour la compétitivité des entreprises européennes qui se verraient exposées au « dumping écologique » de pays tiers qui eux n’auraient pas pris des engagements comparables à ceux des états de l’UE. M. Jean-Pierre Clamadieu, responsable de la commission du développement durable du MEDEF posait ainsi les termes du problème: « Le MEDEF soutient l'engagement de l'Union européenne de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 20 % avant 2020, et de 21 % pour le secteur industriel. Les entreprises contribueront à la réalisation de cet objectif. Toutefois, je mets en garde contre l'éventualité de passer à un objectif d'une réduction de 30 % si la Conférence de Copenhague débouchait sur un accord satisfaisant. Alors que l'objectif de moins 20 % représente déjà une accélération de la trajectoire, celui de moins 30 % constituerait une rupture forte qui n'aurait de sens que si elle avait pour contrepartie des engagements réels des partenaires de l'Union européenne. Notre inquiétude est de voir celle-ci mettre encore davantage sur la table de négociation pour forcer la conclusion d'un accord, alors que les autres pays demeureraient en retrait. La condition de l'efficacité d'un accord suppose l'élaboration de mécanismes précis de vérification des émissions et l'Union européenne doit veiller à ne pas prendre des engagements en décalage par rapport à ceux des autres puissances industrielles ». Le résultat de Copenhague a donc déçu également les représentants de l’industrie européenne qui plaidaient  pour un accord international qui leur aurait donné la « visibilité » nécessaire pour réaliser et amortir les investissements dans les technologies réductrices d'émissions de gaz à effet de serre. Dans un communiqué publié à la fin de la Conférence de Copenhague, le patronat européen (BUSINESSEUROPE, anciennement UNICE) exprimait ses « vifs regrets » que le Sommet n‘ait pu fixer des règles communes et soulignait l’inquiétude des entreprises européennes à la perspective d’être seules à appliquer les règles contraignantes prévues par la législation communautaire pour lutter contre les émissions de CO2 . Dans le cadre du plan d’action de lutte contre le réchauffement, l’industrie doit réduire, d'ici 2020, ses émission de CO2 de 21% par rapport à ce qu’elles étaient en 2005. Mais l'allocation de droits gratuits d'émissions de C02 est possible pour éviter à certains secteurs industriels de devoir délocaliser leur production et leur permettre de rester compétitifs face à la concurrence des entreprises installées dans des pays tiers où les contraintes en matière d’environnement sont plus faibles voire inexistantes.

    Anticipant un échec, la Commission européenne a prévu une liste de 164 secteurs industriels de l'Union Européenne qui seront bénéficiaires de droits d'émissions de C02 gratuits.

    Une autre piste est la création d’une « taxe carbone » aux frontières extérieures de l’Union sous réserve que ce mécanisme puisse être compatible avec les règles de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Mais les états sont divisés sur cette mesure.

    Les limites de la méthode intergouvernementale

    Une « victime collatérale » du faible accord de Copenhague, est la méthode intergouvernementale, qui a été mise en cause aussi bien par la délégation du Parlement européen, que par de nombreux observateurs. Ainsi l’eurodéputé Jo Leinen constatait-il : « la Conférence de Copenhague a démontré une grande insatisfaction et inefficacité de la méthode des conférences des Nations-Unies. Une réforme approfondie du processus de prise de décision au sein des Nations-Unies devient d'une urgente nécessité". Un article du journal espagnol El Pais allait plus loin : « Nous ne possédons qu'une seule planète, or nous la gérons selon un système de gouvernement ridicule fondé sur un concept obsolète, la souveraineté. En son temps, la souveraineté fut une invention utile pour mettre fin aux guerres de religion et imposer une autorité centrale unique aux seigneurs féodaux. Mais aujourd'hui, alors qu'il nous faut prendre à bras-le-corps la question du changement climatique, les Obama, les Jiabao, les Medvedev, les Singh et les Lula ne se distinguent guère de ces seigneurs de la guerre soucieux de préserver leur autonomie à tout prix, même celui d'un désastre collectif ». L'auteur poursuivait : « Etonnamment, l'Union européenne (UE), bien que restée en marge du conflit à côté des Etats-Unis et des pays émergents, possède deux atouts technologiques clés pour résoudre le problème du changement climatique…la technologie la plus décisive dont dispose l'Europe est de nature institutionnelle. Aussi critiquable que soit son insignifiance sur la scène internationale, l'UE est la preuve tangible qu'il est possible d'apporter des solutions supranationales efficaces à des problèmes mettant en jeu des intérêts nationaux irréconciliables. L'Europe a résolu la rivalité franco-allemande, qui avait fait des millions de victimes, grâce à une formule inventive et équitable d'accès au charbon, à l'acier et à l'énergie nucléaire et de répartition de ces productions. Il semble évident aujourd'hui que seule une autorité supranationale, capable de fixer et de collecter des taxes écologiques à l'échelle internationale pour les redistribuer de façon équitable et financer grâce à ces recettes les adaptations et innovations technologiques nécessaires, pourra lutter contre le réchauffement climatique. L'UE possède donc, une fois n'est pas coutume, quelque chose qui s'apparente à une solution idéale » ( José Ignacio Torreblanca : « Una Autoridad Mundial sobre el Clima », El pais, 21/12/2009).

    Le Sommet de Copenhague a en effet montré les limites de la méthode intergouvernementale. Comment penser que des décisions puissent être prises selon une procédure fondée sur le consensus et où le droit de veto dont disposent les états accorde à un seul le pouvoir de tout bloquer ou de ralentir des décisions urgentes et d’intérêt commun?  Dans le monde multipolaire d’aujourd’hui, l’UE doit jouer pleinement son rôle et la « méthode communautaire » doit y contribuer.

     

    Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une excellente année en espérant que 2010 soit propice aux initiatives de fraternité, d’égalité, de liberté et de solidarité.

    Domaguil

  • Retour sur la Conférence de Copenhague

    192 pays s’étaient  retrouvés à Copenhague le 7 décembre 2009 pour trouver un accord qui succèderait au protocole de Kyoto signé en 1997 et qui expire fin 2012. Celui-ci impose la limitation des gaz à effet de serre à 38 pays industrialisés signataires (pas les Etats-Unis) sous forme d’engagements chiffrés, à peine d’amendes s'ils ne les respectent pas.

    Que fait l’Union européenne pour lutter contre le réchauffement climatique?

    L’Union européenne a adopté un ensemble de mesures visant la mise en place d’une politique commune de l’énergie et de lutte contre le réchauffement climatique.  La Communauté européenne a signé le protocole de Kyoto en 1998 et s’est engagée à réduire de 8% le niveau de ses émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990 pour la période 2008-2012 (date d’expiration du protocole). Le Paquet Energie Climat adopté par le Conseil européen du 12 décembre 2008 prévoit des actions concrètes afin de permettre de réaliser « l’objectif des 20-20-20 » à l’horizon 2020 :

    • réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 20% par rapport à 1990. Cet objectif complète le système communautaire d’échange des quotas d’émission des gaz à effet de serre mis en place en janvier 2005 (le quota est un droit d’émettre une tonne de dioxyde de carbone ou de tout autre gaz à effet de serre d’effet équivalent au cours d’une période spécifiée). Il se concrétise dans des mesures législatives telles que, par exemple, l’adoption de nouvelles normes pour les voitures particulières (« voitures vertes » à faibles émissions de CO2)
    • augmentation de l’utilisation des énergies renouvelables de manière à représenter 20% de la production totale d’énergie
    • réduction de la consommation d’énergie de 20% par rapport au niveau prévu pour 2020 grâce à l’amélioration de l’efficacité énergétique (par exemple, législation communautaire sur la performance énergétique des bâtiments, ou encore élargissement de l’étiquetage énergétique à de nouvelles catégories de produits).

    Les enjeux de la conférence de Copenhague

    A Copenhague l’enjeu était d’amplifier les efforts entrepris dans le cadre du protocole de Kyoto, pour  passer à une économie durable à faibles émissions de dioxyde de carbone, créatrice d'emplois et d’activité, ceci dans un contexte d’urgence car le dérèglement climatique commence à produire ses effets de façon plus rapide que cela n’était escompté .

    A la veille de la Conférence, la commission des affaires européennes du Sénat français tenait une réunion pour en exposer les enjeux

    Ceux- ci étaient résumés en ces termes : « Il faut saisir l'opportunité de la crise actuelle pour passer à une économie durable à faibles émissions de dioxyde de carbone, qui stimulera l'activité et sera créatrice d'emplois. Cette transition est d'autant plus nécessaire que le dérèglement climatique, plus rapide que prévu, a déjà commencé à produire ses effets. En conséquence, il faut défendre un accord ambitieux qui comporte non seulement des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les pays industrialisés comme pour les pays en développement ainsi que des engagements financiers en faveur de ces derniers, mais aussi un mécanisme de sanction pour les pays qui ne respecteraient pas leurs engagements » (intervention de Jean-Paul Emorine).

    La position de l’Union Européenne

    En prévision de la Conférence de Copenhague, le  Conseil européen des 29 et 30 octobre 2009 avait adopté une position commune de l’Union européenne qui constituait le mandat sur la base duquel celle-ci participait aux négociations. Les principaux points étaient un objectif d’augmentation maximum de la température  de 2°C et une réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre d’au moins 50% par rapport aux niveaux de 1990 (et de réductions cumulées des émissions dans les pays développés d’au moins 80% à 95%  d’ici 2050), ainsi que l’octroi d’une  aide financière aux pays en développement pour lutter contre le changement climatique grâce à un financement international. L’Union européenne s’engageait à faire un effort supplémentaire et porter à 30% (et non plus à 20%) la réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2020 par rapport aux niveaux de 1990, si un accord mondial pour l’après 2012 était obtenu à Copenhague, ce qui impliquait que d’autres  pays développés s'engagent à atteindre des réductions d'émissions comparables et les pays en développement à apporter « une contribution adaptée à leurs responsabilités et à leurs capacités respectives ». Sur l’aide aux pays en développement, les 27 estimaient que l’enveloppe publique mondiale nécessaire se situait dans « une fourchette allant de 22 à 50 milliards d'euros par an d'ici 2020 » dont 5 à 7 milliards d’euros par an jusqu’en 2012. Mais à ce stade, ils n’avaient pas voulu chiffrer la contribution annuelle de l'UE, et préféré attendre les négociations de Copenhague, une réticence dénoncée par les ONG de défense de l’environnement qui demandaient une position plus offensive de l’UE. Le 11 décembre, les 27 faisaient une proposition chiffrée se déclarant « prêts à contribuer à un financement à mise en oeuvre rapide de 2,4 milliards d'euros par an pour la période de 2010 à 2012 ». Les européens pensaient par cet engagement qui représentait 30% des crédits internationaux estimés nécessaires  par la Commission européenne, inciter les autres pays développés à chiffrer leur contribution.

    A suivre dans une prochaine note

    Et en attendant:   JOYEUSES FETES A TOUS!


  • Acces aux professions juridiques dans un autre état membre

    Afin de faciliter l’application des principes de libre circulation des travailleurs dans l’Union européenne (article 39 du traité de la Communauté européenne, devenu 45 du Traité sur le Fonctionnement de l’UE) ) et de libre établissement des professionnels dans le pays de leur choix (article 43 du traité CE, devenu article 49 du TFUE), il existe un système de reconnaissance des diplômes et des qualifications professionnelles entre les différents pays membres.  C’est l’objet des directive 2005/36 du 07/09/2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et 2001/19 du 14 mai 2001 sur le système général de reconnaissance des diplômes d’enseignement supérieur. Cette dernière a refondu en une seule législation des dispositions générales et des textes qui réalisaient une harmonisation des conditions minimales de formation applicables à des professions déterminées : médecin, infirmier responsable de soins généraux, dentiste, vétérinaire, sagefemme, pharmacien et architecte. Quant aux  avocats  qui souhaitent travailler dans un autre état membre sous leur titre d'origine, ils  sont couverts par les directives 77/249  et 98/5 visant à faciliter l’exercice permanent de la profession d’avocat dans un état membre autre que celui où la qualification a été acquise.

    Dans une décision du 10/12/2009, la Cour de Justice de l’Union européenne a eu l’occasion de rappeler  que ces directives ne concernent que « l’avocat pleinement qualifié comme tel dans son État membre d’origine » (CJUE, 10/12/2009, aff. C-345/08 Krzysztof Peśla / Justizministerium Mecklenburg-Vorpom, considérant 23).

    La Cour avait été saisie d’un litige opposant un polonais, M. Peśla, au ministère de la Justice du Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale au sujet du refus de ce dernier de l’admettre, sans passer un examen d’aptitude dans les matières juridiques qui sont obligatoires pour les épreuves dites du «erstes juristisches Staatsexamen» (examen d’État en droit), au stage de préparation aux professions juridiques en qualité de stagiaire en droit («Rechtsreferendar»). M. Peśla était titulaire d’une maîtrise en droit délivrée par la faculté de droit de l’université de Poznań, d’un «Master of German and Polish Law» et d’un titre de «Bachelor of German and Polish Law» délivrés par  la faculté de droit de l’université de Francfort-sur-l’Oder (Allemagne). Après avoir obtenu ces diplômes, il avait demandé à être admis au stage préparatoire aux professions juridiques du Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale, faisant valoir ses titres qui selon lui, lui conféraient l’équivalence requise pour pouvoir accéder directement au stage. Il invoquait les dispositions des directives qui régissent la reconnaissance des diplômes et qualifications d’avocat entre états membres pour permettre la libre circulation. Suite au refus du Land de reconnaître cette équivalence, l’affaire avait finalement été portée devant la juridiction communautaire.

    Les questions qui lui étaient posées étaient, tout d’abord, de savoir quelles sont les connaissances à prendre comme élément de référence pour apprécier si l’auteur d’une demande d’admission directe, sans passer les épreuves prévues à cet effet, à un stage de préparation aux professions juridiques possède un niveau de connaissances équivalent à celui normalement requis pour accéder à un tel stage dans l’État membre concerné. Ensuite, il était demandé à la Cour si le droit communautaire exige que le niveau des connaissances du droit de l’État membre d’accueil requises pour être admis au stage et l’admission aux professions juridiques soit, dans une certaine mesure, diminué afin de promouvoir la libre circulation des personnes.

    A la première question, la Cour répond que l’exercice des activités de stagiaire en droit est conçu comme constituant la partie pratique de la formation nécessaire pour l’accès aux professions juridiques allemandes et est séparable des professions juridiques allemandes proprement dites, telles que celle d’avocat. Elle ne relève donc pas des dispositions des directives invoquées. « Cette activité », précise la Cour,  « ne peut être qualifiée de «profession réglementée» au sens de la directive 89/48 du 21 décembre 1988, relative à un système général de reconnaissance des diplômes d’enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d’une durée minimale de trois ans… telle que modifiée par la directive 2001/19… du 14 mai 2001». Par conséquent, « en l’absence d’harmonisation des conditions d’accès à une profession, les États membres sont en droit de définir les connaissances et qualifications nécessaires à l’exercice de cette profession et d’exiger la production d’un diplôme attestant la possession de ces connaissances et qualifications » (considérant 34) à condition toutefois que les dispositions nationales adoptées constituent pas  « une entrave injustifiée à l’exercice effectif des libertés fondamentales garanties par les articles 39 CE et 43 CE ». Cela implique que les autorités nationales doivent, lorsqu’elles examinent la demande d’un ressortissant d’un autre État membre d’obtenir l’accès à une période de formation pratique en vue de l’exercice ultérieur d’une profession réglementée, prendre en considération la qualification professionnelle de l’intéressé en procédant à une comparaison entre, d’une part, la qualification attestée par ses diplômes, certificats et autres titres ainsi que par son expérience professionnelle pertinente et, d’autre part, la qualification professionnelle exigée par la législation nationale. Si cette comparaison aboutit à la constatation que les connaissances et qualifications attestées par le diplôme étranger correspondent à celles exigées par les dispositions nationales, l’état membre est tenu d’admettre que ce diplôme remplit les conditions posées par celles-ci. Mais si la comparaison ne révèle qu’une « correspondance partielle entre ces connaissances et qualifications, l’État membre d’accueil est en droit d’exiger que l’intéressé démontre qu’il a acquis les connaissances et les qualifications manquantes » (considérant 40). Et il résulte d’une jurisprudence établie que les connaissances à prendre en considération sont celles attestées par la qualification exigée l’état d’accueil concerné et non se limiter aux études juridiques effectuées portant sur le droit d’un autre état membre. Le simple fait  que celles-ci soient considérées comme comparables du point de vue du niveau de la formation reçue, du temps et des efforts déployés à cet effet, aux études exigées par l’état d’accueil ne suffit pas.

    A la seconde question, la Cour répond par la négative : le principe de la libre circulation des personnes n’implique pas  d’abaisser, même légèrement, le niveau des connaissances requises du droit de l’état membre d’accueil. Le demandeur faisait valoir que l’article 39 CE serait vidé de son sens si l’État membre d’accueil pouvait exiger du candidat le même niveau de connaissances de son droit national que celui attesté par la qualification professionnelle requise dans cet État pour l’accès auxdites professions. Un argument rejeté par le juge communautaire qui  rappelle : « l’effet utile de l’article 39 CE n’impose pas que l’accès à une activité professionnelle dans un état membre soit soumis à des exigences inférieures à celles normalement requises des ressortissants de cet état » (considérant 50). Autrement dit, la liberté de circulation n’impose pas de nivellement par le bas des qualifications.

    Domaguil

  • Les passagers victimes de retards de vols ont droit à une indemnisation

     

    Un retard de trois heures (ou plus) justifie que le passager aérien qui en est victime puisse obtenir une indemnité de la compagnie aérienne (saut si le retard est du à des circonstances exceptionnelles). Telle est la décision rendue par la Cour de Justice des Communautés européennes le 19/11/2009 dans deux affaires impliquant la compagnie Air-France. La Cour fait ainsi une interprétation extensive des dispositions du règlement 261/2004 sur l’indemnisation et l’assistance due aux passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol. Ce texte prévoit qu’en cas d’annulation d’un vol, les passagers peuvent recevoir une indemnisation forfaitaire d’un montant compris entre 250 et 600 euros, mais, s’il contient des dispositions pour l’assistance aux passagers victimes de retards, il ne leur reconnaît pas expressément un droit à être indemnisés.

    La Cour avait été saisie par les Cours suprêmes allemande et autrichienne, à la suite de recours portés devant ces juridictions par des passagers qui réclamaient, respectivement à Condor et à Air France, le versement de l'indemnité prévue par le règlement pour le cas d'annulation d'un vol, au motif qu’ils étaient arrivés à destination avec des retards de 25 et 22 heures par rapport à l'heure d'arrivée prévue.

    La Cour précise d’abord qu’un retard même important se distingue d’une annulation de vol. Car, dit le juge communautaire : « … un vol retardé, indépendamment de la durée du retard, fût-elle importante, ne peut être considéré comme annulé lorsqu’il donne lieu à un départ conformément à la programmation initialement prévue » (considérant 34), c’est à dire lorsque, mis à part l'heure de départ, tous les autres éléments du vol tels qu'initialement programmés, et en particulier l'itinéraire, restent inchangés. Et le juge communautaire n’hésite pas à entrer dans les détails en soulignant que « ne constitue pas, en principe, un élément décisif » le fait que les passagers récupèrent leurs bagages ou obtiennent de nouvelles cartes d’embarquement, pas plus que  les indications sur le tableau d'affichage de l'aéroport, les informations données par le personnel, ou encore une modification de la composition du groupe de passagers.

    En revanche, si la compagnie aérienne assure, postérieurement à l'heure de départ prévue, le transport des passagers sur un autre vol, le retard est alors assimilable à une annulation.

    Doit-on en conclure que les passagers victimes de retards, même importants, du vol initialement prévu ne peuvent prétendre à aucune indemnisation ?

    Non, répond la Cour, car ils subissent un préjudice (la perte de temps) comparable à celui des passagers dont le vol est annulé. Or, ceux-ci bénéficient aux termes du règlement, d’un droit à indemnisation même lorsqu'ils sont réacheminés par la compagnie aérienne sur un autre vol, à condition qu’ils aient perdu au moins trois heures par rapport à la durée prévue initialement. Si on refuse le droit à indemnisation aux passagers de vols retardés « ceux-ci seraient traités d’une manière moins favorable » (considérant 58). Et, conclut le juge communautaire, « aucune considération objective ne paraît susceptible de justifier une telle différence de traitement ». (considérant 59).

    Seules des « circonstances exceptionnelles » peuvent libérer la compagnie aérienne de son obligation d’indemnisation. Les compagnies aériennes Air France et Condor invoquaient donc des défaillances techniques pour expliquer les retards intervenus ces défaillances constituant, selon elles , des «circonstances extraordinaires». Mais la Cour rappelle qu’ « un problème technique survenu à un aéronef qui entraîne l’annulation d’un vol ne relève pas de la notion de «circonstances extraordinaires» au sens de cette disposition, sauf si ce problème "découle d’événements qui, par leur nature ou leur origine, ne sont pas inhérents à l’exercice normal de l’activité du transporteur aérien concerné et échappent à sa maîtrise effective »  (considérant 70).

    Cette décision est intéressante par deux aspects, principalement :

    Parce qu’elle étend la protection des droits des consommateurs (en l’espèce  celui des passagers aériens) dans l'Union européenne

    Parce qu’elle est un exemple de la méthode de l’interprétation de la règle de droit par le juge communautaire.

    Celui-ci rappelle que l’interprétation doit se fonder non seulement sur les  termes du texte interprété, mais également sur le contexte qui a présidé à son élaboration et à son adoption et les objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie, ce qui implique de se référer non seulement au dispositif de l’acte mais aussi à la motivation comprise (considérants 41 et 42).

    L’interprétation doit veiller à préserver l’effet utile de l’acte en privilégiant, lorsque plusieurs interprétations sont possibles, celle qui est la plus favorable dans ce sens (considérant 47).

    Enfin, l’interprétation d’un acte de droit dérivé doit être réalisée au regard du droit primaire et notamment des principes consacrés par les traités (en l’occurrence, « le principe d’égalité de traitement qui exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié ») (considérant 48).

    Arrêt:

    (CJCE, 19/11/2009,aff.jointes C-402/07 et C-432/07, Sturgeon / Condor Flugdienst GmbH et Böck e.a. / Air France SA)

     

    Domaguil